MILIEU MOUVANT - exposition curatée par Violette Morisseau - pal project
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Expositions
10.12.21 - 15.01.22
Nefeli Papadimouli/MILIEU MOUVANT

Milieu mouvant 

Artiste et architecte, Nefeli Papadimouli questionne l’espace, dimension cruciale de sa pratique artistique, dans sa relation au corps. Elle crée des « œuvres-étalons », qui, à partir de nos échelles corporelles, permettent de mesurer le réel. Plus précisément, c’est  l’espacement entre les choses et les êtres que l’artiste travaille : cet « espace négatif redéfini comme objet relationnel, l’espace qui nous sépare comme espace qui nous relie ». L’exposition Milieu Mouvant, qui présente des œuvres originales de Nefeli Papadimouli, porte une réflexion sur nos espaces partagés, urbains et publics, et la manière dont nous régulons les distances entre les individus.

« espacentre »

Six éventails sont déployés dans la galerie Pal Project, traités de manière sculpturale : à taille humaine, ils sont réalisés en papier, en tissu, en bois et en métal. Six costumes, faits d’un camaïeu de tissus écrus évoquant les couleurs de la ville, sont associés à chacun des éventails : une possible communauté éphémère se dessine en creux derrière les sculptures. Un film, projeté dans l’espace de l’exposition, montre ces œuvres activées par des performeur.ses, dans un milieu urbain. Manipulés, repliés, déployés, ces éventails géants modifient l’espace et sa perception. Selon leur disposition et leur appui, au sol ou contre les murs de la galerie, les éventails créent des frontières, des ouvertures, des interstices, voire des habitats fragiles. Ainsi, à la manière de tipis, ils offrent parfois aux corps la possibilité d’un refuge, où les spectateurs-ices peuvent se recueillir, seuls ou à plusieurs.

« déplacement perpétuel du contour »

Par leur matérialité, - certains d’entre eux sont lourds, très architecturés, tandis que d’autres sont plus aériens et mobiles - et par les actions qu’ils supposent, (plier-déplier, envelopper-développer, fléchir–résister, inclure-exclure), les éventails deviennent les révélateurs d’expériences profondes et non verbalisées, partagées par une même communauté. Nefeli Papadimouli a ainsi travaillé les « espaces informels», définis par l’anthropologue Edward T. Hall comme «les distances que nous observons dans nos contacts avec autrui»: intimes, personnelles, sociales, publiques, ces distances échappent généralement au champ de la conscience. Dans un monde où tout contact est devenu potentiellement dangereux, ces séparations sociales n’ont jamais été aussi visibles et encadrées. Les éventails de Nefeli Papadimouli les révèlent et permettent de prendre conscience de nos espacements, de la distance à autrui comme un élément de l’équilibre social. Redéfini par les spectateurices qui l’ajustent entre elles et eux, l’espace qui nous sépare devient malléable. 

« middle can move »

La matière est faite de plis, replis, creux, anfractuosités ; il convient de s’y glisser, s’y lover ou s’y insinuer. Ces plis engagent tout à la fois nos petites perceptions et une vision macroscopique du réel. Repliés, ils semblent comprimer l’air qui les entoure; dans leur dépli, se joue une variation continue de la matière autant qu’un développement continu de la forme, un déploiement du sensible qui peut aller jusqu’à « projeter le monde sur la surface d’une pliure ». Avec l’éventail et son « pli qui va vers l’infini », Nefeli Papadimouli nous donne la possibilité d’agrandir nos espaces, et de les partager. Même comprimés, pliés et enveloppés, les éventails sont des puissances d’étirement et d’élargissement du monde.

Violette Morisseau

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